Khanrell n’avait jamais douté une seule seconde qu’elle serait la préfète de sa maison. Après tout, qui d’autre pouvait rêver de ce poste sauf elle? Jamais non plus elle n’avait douté qu’elle mettrait toujours sa famille en premier plan. C’était essentiel. Rien ne comptait plus au monde que conserver l’unicité des Persici, malgré les divisions imposées par l’école en termes de maisons.

Ce qu’elle n’avait pas pu prévoir, c’était qu’un jour, sa détermination d’être la parfaite Préfète et son amour pour sa dévotion envers sa famille entrerait en conflit.

Ce fut la nuit du troisième jour de Samaïn qu’invidia se sentit pour la première fois divisée entre ses responsabilités scolaires et familiales.

La tradition familiale voulait que tous les membres de la famille passent la journée du sabbat ensemble pour se préparer à une nuit de festivités. Hors, si toute sa fratrie avaient rejoint leurs parents à la boutique de Pré-au-Lard, Khanrell avait dû rester à l’école pour aider aux préparatifs du sabbat de Poudlard. La jeune femme cru qu’elle ne se libérerait jamais à temps pour célébrer cette fête sacrée avec les siens, et fut soulagée de se proposer pour aller prévenir les habitants du village qu’ils étaient invités à se joindre au feu sacré allumé par les quatre fondateurs.

S’empressant de réaliser sa tâche, Invidia demanda à chaque sorcier et sorcière d’éteindre son propre foyer pour se joindre à la grande festivité qui unirait l’école et le village, dans le but de renforcir les liens de la communauté. Elle s’était gardée sa propre maisonnée pour la fin. Si les Persici avaient toujours eu comme tradition de souligner le changement de saison entre eux, accepteraient-ils de briser leurs habitudes pour se joindre aux autres? Ils pouvaient tous être si conservateurs, surtout leur père, qui peinait encore à s’acclimater à leur nouveau chez eux.

Khanrell hésitait à s’annoncer en mettant les pieds dans la résidence familiale. Elle aurait dû se départir de son manteau et se joindre à la danse qui animait les siens. Mais elle était attendue au sabbat de Poudlard. Elle était même nécessaire! Elle avait un devoir. Ainsi, elle ne se déchaussa même pas pour se glisser dans la salle familiale et se racler la gorge pour qu’on la remarque.

-Je suis là… interrompit-elle froidement en évitant le regard de son père, se fixa plutôt sur ceux des benjamins de la famille, dont l’énergie bouillonnante ajoutaient à l’engouement général. Tout le monde nous attend, à mi-chemin entre l’école et le village, pour qu’on célèbre tous ensemble. Iro, Gula, dépêchez-vous d’aller vous habiller chaudement, vous ne voudriez pas prendre froid, n’est-ce pas? demanda-t-elle avant de s’attarder à ses autres frangins, il ne faut pas oublier d’éteindre notre feu. Il va falloir le rallumer demain matin avec les cendres chaudes du feu sacré, qu’on partagera entre tous.

Enfin, elle posa son regard sur sa mère. En tant qu’enseignante dans Poudlard, elle était déjà supposée être au courant que tout Pré-au-Lard et Poudlard devait s’unir pendant le Sabbat, et pourtant, elle n’avait pas préparé sa famille. Elle n’avait pas informé son mari. Elle n’avait pas éteint leur foyer. Avec une insistance muette, Khanrell fixa sa mère, lui intimant de se charger de prendre la décision pour tout le monde, pour que ça ne vienne pas d’elle, pour qu’ils soient tous obligés de s’y rendre. Pour qu’elle ne soit pas la seule à manquer le sabbat familial.

Pour qu’elle n’ait pas à choisir.

Soupirant, Invidia se tourna à nouveau vers les deux plus jeunes de la famille.

-Iro, Gula, si vous êtes déjà prêts, on peut prendre de l’avance sur les autres, et ils nous rejoindront plus tard? offrit-elle en leur tendant la main dans l’espoir qu’ils l’accompagnent à l’extérieur.

Ne pas donner le choix. Imposer. C’était de l’Envie tout craché.